• tragicomic flag 1, 2014. tragicomic flag 1, 2014.
  • tragicomic flag 1, 2014. tragicomic flag 1, 2014.
  • tragicomic 1, 2014. tragicomic 1, 2014.
  • tragicomic 2, 2014. tragicomic 2, 2014.
  • tragicomic 3, 2014. tragicomic 3, 2014.
  • tragicomic flag 2, d’après une photographie de Ronald Hammega, 2015. tragicomic flag 2, d’après une photographie de Ronald Hammega, 2015.
  • tragicomic 4, 2015. tragicomic 4, 2015.
  • tragicomic 5, 2015. tragicomic 5, 2015.
  • tragicomic 6, 2015. tragicomic 6, 2015.
  • tragicomic flag 3, 2017. tragicomic flag 3, 2017.
  • tragicomic flag 3, 2017. tragicomic flag 3, 2017.
  • tragicomic flag 4, 2017. tragicomic flag 4, 2017.
  • tragicomic flag 4, 2017. tragicomic flag 4, 2017.
  • tragicomic flag 4, 2017. tragicomic flag 4, 2017.
  • tragicomic 7, 2020.
  • tragicomic 8, 2020.
  • tragicomic 9, 2020.
  • ici tout va bien, 2020.
  • ici tout va bien 1, 2020.
  • ici tout va bien 2, 2020.
  • ici tout va bien 3, 2020.
Date
Category
Drawing, Painting
About This Project

Tragicomic

Ici et maintenant. Voilà ce qui, à mon sens et à la suite d’un paquet de réflexions houleuses, représente la fonction principale des images aujourd’hui : exalter le présent. Le monde va mal, on en a jamais été plus certains. On ne croit plus en l’avenir, on sait que la planète est condamnée et on la voit prendre, jour après jour, des allures de fruit avarié. On ne croit plus à l’idéal démocratique et à tout ce qui peut toucher de près ou de loin à la politique. On ne croit presque plus en Dieu. Ou encore un peu trop. On ne croit plus au productivisme, on ne croit plus au capitalisme ni à tous ces archétypes qui remettent au lendemain la possibilité de vivre mieux, mais on s’y accroche encore bec et ongles, parce que le fait de remettre absolument tout en question supposerait un tant soi peu d’aspirations lointaines.

Puisqu’on a plus d’emprise sur le lointain, le seul domaine où l’on se sent encore capable d’agir, c’est le quotidien. Et l’on s’applique tant bien que mal à magnifier le présent par le jeu mensonger des apparences. Voilà, ce qui, à mon sens, représente le rôle ingrat et pourtant vital des images. Car je pense que cette esthétisation de l’existence, véritable monde parallèle qui se déploie sous nos yeux, nous tient en vie. Du corps à la maison en passant par ce que l’on donne à voir sur les réseaux sociaux, c’est l’image que l’on soigne. Dans le monde de l’image donc, tout va bien. Et comme pour conforter ce sentiment, mais aussi par souci de plaisir immédiat, on vide petit à petit les images de leur sens. Et l’on applaudit, chaque jour un peu plus, ce qui est anecdotique, superflu, absurde et désinvolte.

Si je m’accorde désormais le droit d’accompagner avec ma peinture la marche de ce grand fast food visuel, c’est sa dimension tragicomique que je veux évoquer. Tragicomique car elle est un leurre à la réalité, un leurre qui pourrait nous rendre cons et oisifs, dans le mauvais sens du terme. Tragicomique parce que cette sauterie virtuelle planétaire repose sur le défaitisme et sur la peur du lendemain. Mais tragicomique surtout parce que, selon moi, tant que cette célébration de l’immédiat, de l’inutile, de l’inconsistant restera non-consciente et cantonnée dans la seule sphère des images, elle constituera le pain et les jeux permettant de maintenir en place l’allégeance face à tout ce en quoi nous ne croyons plus.

À travers ma peinture et le fait de l’ériger en drapeaux, c’est leur charge symbolique que je veux rendre aux images ; En les isolant de ce chaos désinvolte dans lequel nos yeux et notre esprit s’égarent, leur réattribuer du sens, la part de tragique derrière le comique. J’aime utiliser les représentations qui existent comme des allégories de la volonté hédoniste actuelle de vivre à côté de la réalité, mais aussi de toutes les dérives que celle-ci occasionne. Esthétisation à outrance, égocentrisme, surconsommation, perte d’intimité, abrutissement, repli sur soi… Si on ne se laisse pas séduire par leur frivolité, les images regorgent bel et bien de symboles symptomatiques de cette inconcevable réalité.

Si je semble illusoirement, par le choix des images, participer allègrement à ce joyeux folklore visuel, j’essaie, tant que je peux, de m’y opposer par les techniques utilisées pour mettre en scène ces représentations. Ma peinture s’affranchit petit à petit du cadre, que l’on pourrait amalgamer à l’écran, et devient un objet palpable, emblématique et imposant. Une fois détoilée, elle s’éloigne également un peu plus de la marchandise et de l’oeuvre standard destinée à décorer les appartements. Le noir et blanc, la toile de jute, les objets de récupération sont autant de procédés qui s’opposent à la surconsommation à travers l’économie des moyens. Et tout en affichant cette désinvolture qui lui est propre, ils m’aident également à affirmer tant bien que mal un certain refus de cette « suresthétisation » trop souvent vide de sens.